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Les mots qui restent (1901)
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MUR
« Jenneval est dans vos murs ! »

Jenneval fut un acteur assez médiocre, parait-il, et néanmoins assez goûté du public, qui avait la spécialité de courir la province et d'y jouer les rôles de Frederick Lemaître, en particulier dans le répertoire d'Alexandre Dumas. Il parut même plusieurs fois sur les théâtres de Paris, notamment au Théâtre du Cirque, où il créa un rôle important dans la Prise de Pékin, en 1801.

Il s'était acquis une sorte de célébrité, qui lui a survécu, par la fameuse formule qui figurait sur ses affiches.

« Jenneval, écrit M. Jules Prével dans le Figaro du 9 janvier 1889, avait été souvent blagué par les journaux sur la grandeur des affiches où il annonçait ses représentations : son nom seul — JENNEVAL — y prenait des dimensions énormes, toujours plus grosses que le titre du drame où il allait se montrer. C'est lui qui avait inventé cette affiche pour les villes de province :

« Habitants de ***
» Rêjouisses-vous
» JENNEVAL EST DANS VOS MURS. »

Le beau Jenneval, comme on l'appelait, fut longtemps accompagné dans ses tournées par sa camarade et amie Clarisse Miroy, dont la mort le laissa inconsolable.

Après avoir été inspecteur des Omnibus, puis des Petites-Voitures, il était, dit-on, à la fin de sa vie, employé à la Préfecture de police, au bureau des objets perdus. Il mourut le 7 janvier 1889, à l'âge du soixante-sept ans.

Nous ajouterons que l'expression « dans nos murs », qui aujourd'hui fait sourire, était fort en honneur dans les documents officiels vers la fin de la Restauration, alors que M. Prudhomme florissait.

Lors de rembarquement pour Alger de l'armée d'expédition, le Moniteur du 16 mai 1830 publiait des nouvelles de province ainsi libellées :

« Avignon, le 9 mai. — M. le Dauphin, de retour de Toulon, est entré dans nos murs.
» Grenoble, le 11 mai. — S. A. R. M. le Dauphin est arrivé dans nos murs, le 8...
» Lyon, le 10 mai. — L'enthousiasme de Marseille et de Toulon a trouvé de l'écho dans nos murs. »

On s'intéresse toujours à ce qui se passe derrière un mur.

Cette réflexion, qui caractérise avec tant de vérité la curiosité des badauds parisiens, est due, on le sait, à Victor Hugo. On la trouve au premier chapitre de son roman Notre-Dame de Paris, publié pour la première Ibis en 1831.

Décrivant l'affluence qui se pressait aux abords du Palais de justice, le 6 janvier 1482, pour voir représenter un mystère auquel devaient assister les ambassadeurs flamands, le grand poète écrivait :

« Aux portes, aux fenêtres, aux lucarnes, sur les toits, fourmillaient des milliers de bonnes figures bourgeoises, calmes et honnêtes, regardant le Palais, regardant la cohue, et n'en demandant pas davantage ; car bien des gens à Paris se contentent du spectacle des spectateurs, et c'est déjà pour nous une chose très curieuse qu'une muraille derrière laquelle il se passe quelque chose. »

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